Embargo sur le charbon russe : une mesure sans effets

La crise en Ukraine a entraîné une rupture brutale des relations commerciales entre l’Union européenne et la Russie. L’embargo sur le charbon russe a engendré une course à l’énergie sans pour autant faire fléchir les occidentaux.

« Sans effet”. C’est ainsi que Camille Defard, cheffe du Centre Energie de l’Institut Jacques Delors et chercheuse en politique européenne de l’énergie, qualifie l’embargo sur le charbon russe. Entrée en vigueur le 11 juin 2022, cette décision de la commission européenne faisait partie d’un ensemble de sanctions suite à l’invasion de l’Ukraine. Pour la chercheuse, cette mesure coercitive prise par l’Union européenne n’a pas ébranlé la puissance financière du pays de Vladimir Poutine. 

Camille Defard avance qu’une sanction sur le pétrole ou le gaz naturel liquéfié aurait eu plus de conséquences sur l’économie russe.  “Ce n’est pas hyper impactant, en tout cas pas autant qu’un embargo sur le pétrole [mis en place en décembre] ou le gaz [pas encore décidé], d’où le fait que l’embargo sur le charbon a été l’une des premières mesures prises par l’UE”, poursuit la chercheuse. 

Les importations de houille depuis la Russie coûtaient quatre milliards d’euros par an à l’Europe, contre près de 70 milliards pour le pétrole et le gaz. Une manne financière que se partagent dorénavant les autres producteurs de diamant noir. 

“Une arme de guerre”

L’utilisation du charbon comme moyen de pression d’un État sur un autre n’est pas un phénomène nouveau. Avant le blocus européen, la Chine a placé sous embargo le charbon australien en 2020, en réponse à une enquête demandée par Canberra sur les origines du Covid-19. Et depuis, les deux pays entretiennent des relations commerciales tendues. 

Stéphane His, ingénieur énergétique, affirme que le charbon n’est pas une arme de guerre dans la mesure où les États ont entrepris leur virage écologique. Pour lui, “le charbon est beaucoup moins stratégique que le gaz pour l’Europe”.  La décision européenne a engendré un recul de plusieurs pays sur les questions écologiques. Certains comme l’Allemagne ont rouvert des mines pour ne pas souffrir de rupture dans l’approvisionnement en électricité.

Vers d’autres fournisseurs

Cette sanction à l’encontre du principal fournisseur de l’UE profite à d’autres producteurs dans le monde. L’Afrique du Sud, les Etats-Unis et l’Australie ont produit à eux seuls 1,5 milliards de tonnes de charbon en 2022. Ce sont les pays vers lesquels les 27 se sont tournés pour ne pas manquer de charbon.

Au vu de l’abondance de cette matière première dans le monde, l’économiste Alain Safa affirme que le charbon n’est pas un levier de pression sur le plan diplomatique. “Cet embargo reste dans le domaine symbolique. C’était un signal pour dire que les Européens résistent et qu’ils sont prêts à aller plus loin dans les sanctions”, poursuit-il. Pour lui, l’UE a voulu envoyer un signal fort au monde sans pour autant se passer du gaz et du pétrole russe. L’embargo sur le charbon n’a pas permis à l’UE de se tourner vers d’autres énergies moins polluantes. Elle s’est lancé dans une course aux fournisseurs pour remplacer le diamant noir russe.

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